Les épingles de pardon

Ces épingles sont caractéristiques de la Cornouaille, dans le Finistère. Elles sont appelées épingles « de pardon » (spilhou pardon en breton) du fait du contexte dans lequel elles pouvaient être achetées. Elles étaient effectivement vendues par les marchands ambulants pendant les Pardons, pèlerinages religieux propres à la Bretagne.

Pointe-du-Raz. Pardon de Notre-Dame des Naufragés. Carte postale
© Château des ducs de Bretagne–Musée d’histoire de Nantes

Ces épingles mesurent entre 8 et 12 cm. Une importante perle en verre soufflé, d’une grande fragilité, en constitue la tête. Elles sont agrémentées de pendeloques également composées d’élégantes perles de verre provenant certainement de Bohême, en Europe centrale. L’ensemble est décoré de breloques métalliques, en cuivre ou en argent, dont le traitement ajouré et les motifs évoquent le Maghreb, dans un écho à l’orientalisme du milieu du 19e siècle. Si l’usage de ces épingles est très localisé, leur production n’est certainement pas bretonne.

Ces objets, au-delà de leur aspect décoratif, sont porteurs d’une fonction sociale. Ils sont achetés par les jeunes hommes pendant les Pardons pour être offerts en cadeau à l’élue de leur cœur, matérialisant ainsi le souhait d’une demande en mariage. Si, par la suite, la jeune femme porte l’épingle sur son corsage du côté du cœur, cela signifie qu’elle accepte la proposition. Si elle accroche ce bijou du côté droit, cela marque à l’inverse un refus.

Jeune femme en costume bigouden. Entre 1920 et 1950. Photographie sur plaque de verre. Attribuée à Joseph Stany Gauthier
© Château des ducs de Bretagne–Musée d’histoire de Nantes

Ces épingles à forte charge symbolique sont par ailleurs jetées dans les fontaines qui jalonnent la Bretagne avec différents objectifs : assurer un mariage dans l’année, favoriser la fécondité, avoir une guérison rapide…

Le Faoüet. Fontaine Sainte-Barbe. Les jeunes filles désirant se marier dans l’année vont y jeter des épingles
© Château des ducs de Bretagne–Musée d’histoire de Nantes

Ainsi, ces objets dont la production révèle la circulation des matériaux et des formes, sont autant liés à la vie sociale qu’aux croyances régionales dans une partie du Finistère.

Les objets exposés dans le cadre du jeu des objets mystères sont issus du musée d’Art populaire régional, l’un des six musées constitutifs du musée d’histoire de Nantes. Des salles consacrées à l’art régional existent dès l’inauguration du musée des Arts décoratifs au château en 1924. Le musée d’Art populaire régional devient un musée à part entière après la Seconde Guerre mondiale, tout en restant au sein du château. Plus de 5000 objets bretons, vendéens et du pays nantais y sont rassemblés. Ces collections proviennent de dons successifs, d’achats ponctuels et d’une politique active de collectes, organisées par le premier directeur des musées du château, Joseph Stany Gauthier.